La conception virtuelle : la 3D dans tous ses états !

le 09/06/2021 par Carmel MCDONALD

 

L’urgence écologique, les changements de comportement d’achat, l’intensité concurrentielle, la pandémie du Covid 19 rendent l’innovation nécessaire.  Si la technologie 3D a démontré toute sa puissance pour répondre à de nombreux enjeux : écologique, économique, marketing, son usage peine à se démocratiser dans le secteur de la Mode, Fashion & du Luxe.

 

Pourquoi la modélisation et la conception virtuelle deviennent vitales sur le marché ? Quelles sont les plus-values à déployer ces technologies dans son processus de développement produit ? Quels sont les freins identifiables à la normalisation de cette technologie ? Comment la conception et modélisation virtuelle servent-elles les enjeux de l’entreprise ?

 

Au travers de cet article, nous souhaitons explorer quelques pistes de réflexion.

 

La 3D, au service de l’ensemble du cycle de vie produit

 

Communément, la technologie 3D est assimilée à l’animation virtuelle (comme les défilés) et à la production de visuels pour le marketing et la communication (représentation de produit pour la publicité par exemple). Pourtant son utilisation va bien au-delà et sert de nombreux enjeux : Améliorer la productivité, maitriser ses coûts en réduisant les problèmes de qualité et de défaillance produits, explorer plus d’alternatives de conception, accélérer le développement produit et réduire le Time-to-Market … Autant d’exemples des avantages de l’utilisation de la 3D.

 

Comment la technologie de modélisation 3D rend possible l’optimisation du développement produit ?

 

L’asset 3D trouve sa légitimité à chaque étape de la conception et du développement produit :

 

1- Conception : Le styliste est chargé de définir la tendance de collection, dessiner les styles, trouver des inspirations (coloris, motifs, matières…), le tout dans un temps imparti minimum. La visualisation des croquis 2D en 3D libère leurs créativités. En quelques clics, le croquis prend vie permettant de jouer avec les matières, les volumes, les coloris… Cette modélisation des croquis induit une grande stimulation visuelle et donc accélère le processus créatif.

 

2- Développement : Créer des prototypes n’a jamais été aussi rapide. Le prototypage virtuel n’engendre aucune commande de matière, zéro temps de production et aucun délai de livraison. La réalisation se fait sur place depuis le logiciel 3D provoquant de facto une économie de temps, d’argent et une réduction de l’empreinte carbone émise par l’entreprise.

Par la suite, ce même prototype virtuel est diffusé en interne ou externe pour présenter et valider la collection finale : Turntable, showroom digitalisé, défilé virtuel, essayage virtuel, etc…

L’ensemble des ajustements (coloris, matière, style…) se fait en temps réel rendant possible la visualisation du modèle final. La technologie accélère les processus de prise de décision et de nouvelles économies (coûts des buying sessions, de la production de nouveaux prototypes…).

 

 

 

3- Production : Une fois, le salesman (physique ou virtuel, selon l’engagement digital de l’entreprise) validé, la commande est passée à l’entité de production. L’utilisation de modèles virtuels évitent les problématiques de bien-allers, de fitting et contribue à la bonne compréhension des besoins avec les tiers extérieurs (réduction de problèmes de montage/look).

 

 

4- Publication : De manière simultanée ou juste avant l’étape de production, le modèle 3D est réutilisable pour d’autres usages : défilé virtuel pour présenter la collection aux clients, utilisation en ligne pour la publicité et les précommandes, essayage virtuel pour les clients, etc.

De nombreuses économies sont ainsi réalisées. De plus, publier son produit en ligne avant le démarrage de la production facilite l’ajustement des quantités à produire et donc la baisse des stocks et invendus.

 

 

 

 

5- Vente et e-commerce : Les visuels crées en 3D sont réutilisable sur les sites e-commerce pour permettre aux clients de visualiser le produit dans le détail (sans avoir la nécessité de réaliser un shooting photo). Les personnalisations des produits sont rendues possibles en ligne et certaines entreprises proposent l’essayage virtuel sur un avatar à notre image. Les exigences sont ainsi comblées.

Pour résumé, l’utilisation de la 3D a de nombreux avantages et la technologie aujourd’hui permet de représenter de manière réaliste le produit si bien qu’on arrive à s’imaginer le produit et à y voir ses défauts en le transposant sur des mannequins virtuels.

La 3D peut être utilisée pour matérialiser plus précisément la pensée des stylistes, et ainsi éviter des erreurs de dessin du styliste ou des erreurs d’interprétation du modéliste.

 

Silhouette créée sur CLO 3D

Quels sont les freins à l’utilisation de la 3D ?

 

Adapter son produit aux standards de taille de la marque, représenter de manière réaliste les proportions/volumes, jouer avec les matières et les coloris, manipuler le produit sous toutes ces coutures n’a jamais été aussi simple. Et pourtant le secteur est loin d’avoir démocratisé l’utilisation de la 3D. Pourquoi ? Quels sont les freins à aller vers ce type de technologie ?

 

Certains secteurs, tel que le sportswear, se tournent plus facilement vers les nouvelles technologies. Ils ont été précurseurs dans l’utilisation de la 3D.

 

 

Le frein à l’utilisation de la technologie serait donc principalement culturel ? Il est vrai que, le secteur de la mode a longtemps centré son innovation sur le produit, plutôt que sur la partie digitale. Cet amour du produit, de la matière et cet engagement pour le savoir-faire et le touché peuvent engendrer des réticences au changement : le digital n’est pas forcément perçu pour ses avantages, mais d’abord pour ces contraintes de temps et d’apprentissage.

 

Passer du crayon à l’écran pour créer semble une aberration de prime abord. Cela nécessite de sortir de sa zone de confort, réapprendre son métier et perdre en productivité dans un premier temps… Il faut un temps d’adaptation, qui est très vite oublié lorsque l’on est face aux possibilités qu’offrent les outils.

 

 

Enfin, l’effort financier nécessaire à la mise en œuvre de la 3D constitue la dernière barrière identifiée. Le prix des licences, du matériel informatique, la formation des utilisateurs, la perte de productivité liée à l’apprentissage d’un nouveau processus, sont les freins principaux identifiés par les investisseurs.

 

Le secteur du fashion a-t-il déjà pris trop de retard par rapport à d’autres secteurs ? Comment faut-il s’y prendre afin de remonter ce retard accumulé au fil des années ? Faut-il se lancer dans la 3D ? Le passage à la 3D est un choix stratégique, pour la mettre en place, ce choix doit être porté par la direction générale de l’entreprise et totalement acceptée par les départements de conception. Sans cet alignement, la mise en œuvre de la 3D est souvent vouée à un échec.

Merci à Alexandra BUOR et Jennifer FERRET pour leurs contributions.

le 09/06/2021 par Carmel MCDONALD